Le spectre de la pénurie hante la grande distribution

Publié le par comet

(Publié sur Marianne)Des agriculteurs en colère. Un ministre impuissant dont le cirque des rappels à l'ordre commence à verser dans le lyrisme et les enseignes de la grande distribution qui refusent toujours de réduire leurs marges, c'est le cocktail explosif du week-end qui pourrait bien entraîner des pénuries dans les rayons.
« C’est l’overdose de la dérégulation, l’overdose des pratiques de la grande distribution. (…) Notamment de ceux qui se font les grands champions de la com’ et du Pouvoir d’achat » explique Jean-Bernard Bayard de la FNSEA. Le message est clair. Les paysans et autres producteurs de lait n’ont pas l’intention de renoncer. Ils ne veulent pas cibler une enseigne en particulier mais Leclerc semble en ligne de mire. « Ce sont des groupes coopératifs qui n’ont pas un gros potentiel de développement à l’étranger », nous confie un leader syndical. Du coup, ces groupes doivent faire leurs marges en France, quitte à étouffer les paysans.  

La grande distribution a donc décidé de s’engager dans un bras de fer en maintenant que coûte que coûte son appétit des profits, en témoigne par exemple ses refus répétés de négocier, en dépit de la pâle situation des divers secteurs agricoles en cette période de crise. Contacté, le cabinet de Michel Barnier joue la montre et entend réunir tous les acteurs à Bercy : agriculteurs, industriels et grande distribution. Pour autant, les paysans ne sont pas dupes de ce type de concertation. « L’erreur des pouvoirs publics, c’est de faire confiance aux grands distributeurs. (…) Je me pose sincèrement la question de l’impuissance politique. ». 

Michel Barnier a beau donner dans le lyrisme, les actes ne suivent pas. Il réunit les acteurs, appelle à la responsabilité, organise des concertations, mais ce ne sont que des écrans de fumée. La réalité est qu’il ne possède plus les leviers nécessaires pour réguler les marchés agricoles. La crise du lait en était une parfaite démonstration. Il fallait respecter les règles de la concurrence exigée par Bruxelles. Impossible d’y déroger. L’accord obtenu à l’arraché n’aura servi qu’à calmer les ardeurs à l’approche des élections. Désormais, c’est l’ensemble du secteur agricole qui est mobilisé. 

« On ne peut pas accepter cette jungle, ce marché débridé. Il faut réguler pour sécuriser les consommateurs. » Et pour réguler, il convient d’aller à l’encontre d’une idéologie encore élevée au rang de dogme dans les couloirs de la commission européenne : la loi du marché triomphant. Et le service de presse des centres Leclerc de nous répondre, un peu gêné, lorsque l’on tente de savoir s’ils vont être confrontés à des situations de pénurie ce week-end : « aucun commentaire, nous ne pouvons vous faire aucun commentaire ». Un aveu en forme de vérité, car une chose est sûre, la levée des blocages n’est toujours pas à l’ordre du jour.

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